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Alexandrine Guenée

Alexandrine Guenée-Brard (1898-1991)
Bonne à Billé

La vie à Lepeluet après la guerre 14-18 et anecdotes

Le père Amand Pichot président

  • Marie, elle m’a dit d’autres trucs, elle me met sa réflexion, papa, oui, ça c’est une histoire, que, un jour j’étais allé au catéchisme, et puis j’avais, j’arrivais toujours à l’heure, y a le père Drouadaine qu’était là, avec un autre prêtre, dans la, la la petite chapelle par où les femmes rentraient, et heu, je me rappelle qu’il m’a dit, ah tiens, voilà le, voilà son fils, Amand vient dire bonjour et puis alors moi je, j’allais à l’école à Javené, donc je connaissais peu de gens à Billé, je connaissais bien monsieur le Recteur et monsieur Drouadaine, c’est lui qui m’avait fait ma, le catéchisme de ma première communion et puis il m’avait présenté à hum hum, ils s’étaient mis à discuter, c’est son père qu’on vient d’élire président, heu, là, et puis j’écoutais, oh le président? oh, je n’ai jamais entendu parler de ce président...
    Je suis revenu, heu, évidemment, toi la première, t’as su ton catéchiste par cœur? T’as pas fait de faute? T’as pas respiré? Tas pas laissé de virgules? Ah tu sais bien, parce que, hein, ça c’est le "catéchiste".
  • Oui.
  • On l’apprenait par cœur et avec cœur.
  • C’était sacré.
  • C’était sacré, et puis alors j’ai dû raconter ça et tout d’un coup le père Pichot qui lisait toujours son journal à table, a commencé à baisser la tête davantage, en disant, sacré gamin, il est entrain de dire des choses qu’il ne devrait pas dire...
    La mère Pichot qui était au bout de la table, qu’a dit, mais, mais président?
    Mais oui, je ne sais pas, il a dit président, président de la République, moi je ne sais pas, je n’en connaissais qu’un président, président de la République
  • Oui.
  • Et, mais la mère Pichot était au courant de ce qui s’était passé la veille, elle savait qui c’était qu’est le prêtre qu’était là, et puis elle savait de quelle réunion il s’agissait, et la mère elle s’est mise à dire: "T’as tout de même pas accepté la place de président de cette affaire là?" etc.
    Alors le père a été obligé de dire: "Mais si, ils m’ont nommé président". Il avait été élu président de la caisse rurale de la mutualité agricole de ce temps là
  • Oui.
  • Et il a fait un bon président puisqu’on l’a décoré après tout ça, mais ça c’est une petite histoire et le prêtre qui était là, c’était l’aumônier des œuvres, c’était le père heu, dis moi son nom, il est mort, il est enterré à, à Saint-Georges-de-Reintembault, heu, il a été cité, il a été aumônier de la J.A.C., il comptait, il comptait d’ailleurs sur moi, le chanoine heu, en France on l’a cité comme modèle de, de, et lui il s’était mis dans la tête, après mon départ de Rennes de, que je sois son remplaçant, il m’aimait bien depuis longtemps, il me connaissait et l’histoire de président ça l’avait marqué.

Blessure de Bernard, Augustine Souhars, sa marraine

  • Alors Marie m’a écrit là, Bernard se coupant le cou et les frères se disant, c’est bien fait... ben moi je ne suis pas au courant de cette histoire là, qu’est ce que c’est que cette histoire là?, Bernard qui s’était coupé le cou?
  • Bernard est tombé..., et, on mettait toujours les tégots sur la ragole.
  • Oui.
  • Y avait une ragole au bout du poulailler.
  • Oui.
  • Alors, heu, y avait toujours des, de la casse avec vous autres, les gosses et puis nous des fois aussi.
  • Oui.
  • Alors, les tégots étaient là, voilà que.
  • Les tégots c’est les tessons de bouteille.
  • Il est tombé sur un tesson de bouteille.
  • Oui.
  • Et il, il doit encore avoir la marque parce que heu, il avait...
  • C’était profond oui?
  • C’était profond.
  • Il aurait pu se couper la veine jugulaire ah ah et ça devait saigner en plus.
  • Ah, si ça saignait, alors ils l’emmènent au médecin.
  • Oui.
  • Alors y a fait un pansement, il a.
  • Il a recousu.
  • Il a, il a cousu et puis ils l’ont emmené pour la date que il avait donné pour y renlever les fils.
  • Oui.
  • Alors ils me l’ont emmené, ils ont dit ah ben tu es là cet après midi, tu vas t’en occuper et chose que j’ai fait et on a été tous les deux, Emmanuel et moi puisque Emmanuel vivait core à ce moment là.
  • Oui, oui.
  • On est allé tous les deux le faire enlever les fils et puis après moi je dis, tiens, et ben je dis puisqu’on est à Fougères on va aller voir ta marraine.
  • La Augustine Souhard?
  • Oui, je dis que tu ne connais même pas de trop, enfin elle venait de temps en temps mais.
  • Parce qu’il était jeune, il avait quel âge Bernard, 2-3 ans? 3-4 ans.
  • Oui, alors on va voir la Augustine.
  • La marraine?
  • Oui la marraine et puis elle nous a dit ah dam, vous ne venez jamais Sandrine, qu’elle me dit, vous allez et mon filleul, vous allez rester à manger, alors il a fallu qu’on reste à manger et dans sa cuisine, c’était trop petit et elle avait une, dans son lavoir, elle avait une table euh, assez grande enfin c’était propre, c’était bien parce que elle était très soignée, alors on est restés manger là, et il n’a peut être guère revu depuis.
  • Ben oui parce que, d’abord ça s’est mal terminé, c’était des gens très bien qu’avaient, qui venaient nous voir en voiture, c’était la cousine de maman et monsieur Souhard son mari était très bien, il était directeur ou sous directeur de l’usine Cordier.
  • Oui, il était heu, ah, chef de la coupe, de la piqûre, heu enfin il était bien.
  • Il était haut placé.
  • Il était bien oui.
  • Et en même temps il était secrétaire du député Lefas.
  • Peut-être.
  • Il s’occupait de sa politique et de son secrétariat, ces gens là n’avaient pas d’enfant.
  • Non.
  • Et ils voulaient plus ou moins adopter Bernard, comme son filleul d’ailleurs, mais on ne voulait pas le lui lâcher, hein.
  • Et bé, ben y a pas eu ça, y a eu une jalousie de son frère à elle, alors quand ils venaient à Lepeluet, puisqu’ils avaient une voiture, souvent tes parents disaient et ben on a des pommes de terre, emportez donc des pommes de terre et puis ils leur mettaient un petit sac de pommes de terre et puis, ce qui, on avait des légumes en bon, quoi. Tout d’un coup les vla qu’arrêtent de venir, ta mère trouvait ça drôle, elle dit pourtant, elle dit la dernière fois on leur a pourtant core mis des pommes de terre et tout ça qu’on leur a données bien sûr. Ils ont été chez la Henriette, son frère a dû aller chez la Henriette et ta mère avait dû le dire à Henriette. Elle dit Marie elle trouve drôle, parce elle dit, elle y a core donné des pommes de terre et tout ça. Alors que il n’a fait tout, tout un plat. Il dit oui, vous allez vous faire rincer heu, chez la Marie à Lepeluet, et vous rapportez core des pommes de terre et puis ainsi de suite ce qui a fait un ...
  • Un truc de jalousie.
  • Un truc de jalousie et ben y ne sont plus jamais revenus.
  • Ah bon! Parce que moi je les connaissais bien, et comme je faisais des études, ils me patronnaient un petit peu, c’est le premier qui m’a parlé de Lamennais, de Montalembert, des, il avait une très grande bibliothèque et il me disait Amand, Amand tu sais, de la famille y a que toi qui ai fait des études, la bibliothèque qui est là, je te la donne, et il avait dit à Bernard, sa musique, son phono là, qu’on écoutait les (???) tu demanderais ça à Bernard, en fait ils ont sombré tous les deux dans l’alcoolisme je crois, ils sont morts alcooliques en, au début de la guerre.
  • Ah, ils ne devaient pas être alcooliques.
  • Ils sont tombés alcooliques parce qu’ils n’avaient pas d’enfants, enfin si bien que Bernard n’a jamais eu son, son, le cadeau car il devait hériter plus ou moins de la villa et puis surtout de la musique, Bernard... moi je devais hériter des gros bouquins de trucs que j’aurais bien aimé, parce qu’ils avaient de la valeur, ils avaient des...
  • Et ce qui avait, c’est que la mère est décédée après.
  • Oui.
  • Alors c’était la mère qu’héritait d’eux.
  • Oui.
  • N’ayant pas d’affaire de faite.
  • Oui de faite (silence).

Croyances et superstitions

  • Je voudrai, il y a toujours une chose qui m’a amusée tout en étant dans la famille qu’était très pieuse, très sérieuse, le père Pichot ne riait pas, ne s’amusait pas avec ces choses là et l’ambiance spirituelle de Billé était un fait quoi, c’était vraiment la chrétienté, bon ben on avait ses défauts, y jurait etc. Mais il y a une chose qui m’a toujours amusé c’est les espèces de superstitions, un jour je vous ai récupéré toutes les deux là, vous étiez entrain d’attendre des bouses de vache qui tombaient des vaches pour les lancer dans l’étable, il y en avait toute une bigarrée comme ça aux portes, qu’est ce que vous vouliez faire avec ça? (rires) tu ne rappelles plus?
  • Non, je ne me rappelle pas de ça.
  • C’était, ah, on vous avait dit heu, pour la cocotte ou pour un truc comme ça, fallait faire des choses parce que heu, tout en ayant la foi la certitude de la (????) etc, ça n’empêchait pas de connaitre certains petits secrets, certains trucs, et puis mon Dieu, d’essayer.
  • Oui.
  • Hein, ce n’était pas défendu, si ça marche, hein, regarde bien les écologistes, l’homéopathie à l’heure actuelle qui fait des progrès, y n’y avait pas de raison de faire, on soignait bien les oreillons avec des hirondelles.
  • Oui.
  • les hirondelles étant une plante grasse qui pousse dans les murs de, de, dans le secteur au moins de Javené.
  • Oui je sais bien.
  • On faisait ça et puis c’est reconnu maintenant, mais enfin vous aviez un certain nombre de petites et des dévotions à l’église et des petits trucs que vous aviez comme ça.
  • Oui.
  • Je me rappelle aussi que maman qui avait une tendance à croire facilement un petit peu tout et n’importe quoi, euh, était au courant de certains secrets dits de sainte je ne sais plus quoi, pour la fin de la guerre et, tu ne te rappelles pas? la Sainte Odile, tu ne te rappelles pas de ça? (??? c’est écrit???) on l’avait.
  • Je l’ai aussi, moi.
  • Ah tu l’as aussi, toi, ça serait amusant que tu nous la retrouves et qu’on la lise. Y avait aussi ma mère, j’ai toujours entendu ma mère dire, euh, le, l’histoire concernant heu, les bolcheviques quand les communistes ont pris le pouvoir, je me rappelle vers 1930-35 ou 40 heu, ma mère, je ne sais pas, elle devait raconter ce qu’elle avait entendu que, heu, les années 80, donc c’était plus vieux que nous, hein, ce devait être voir la fin de, des souffrances des chrétiens de Russie, tu ne te rappelles pas de ça?
  • Non je ne me rappelle pas.
  • Tu ne te rappelles pas de ça.
  • Non.

Amand à la guerre 39-45

  • Tu te rappelles de, de la guerre et des soucis que vous avez dû avoir quand les allemands ont envahi et que moi j’étais resté là bas, vous ne saviez pas ce que je faisais là bas?
  • Et ben sûrement pas.
  • Sûrement pas parce que c’était interdit de le savoir, je ne pouvais pas le dire et je ne pouvais pas donc.
  • Tu étais dans la résistance sans doute.
  • Non, oui, ce n’était pas de la résistance, à ce moment là les allemands étaient en face on ne pouvait quand même pas au milieu d’eux, non, on faisait, j’étais dans une équipe de quatre et nous étions à la recherche des postes clandestins, c’est-à-dire de tout ce qui émettait, la 5ème colonne et toutes, y avait des espions partout, nous avions des (gonios?) et des appareils et nous les recherchions, donc c’était secret et (??????) après, nous on a vu que, on était bien au courant puisque c’est nous qui renseignions l’état major si tu veux, ils avaient d’autres sources de renseignement aussi les allemands et autres qu’il a fallu déblayer, mais, nous on est partis de Strasbourg le 14 juin, alors que Paris était déjà occupé par les allemands et que le 14 juin ils arrivaient du côté de Laval et du côté de Caen, si tu veux. Euh, tu te rappelles quand je suis revenu de la guerre, à quelle époque c’était, c’était la fin d’août hein.
  • Oui c’était.
  • Assez tard.
  • Oui.
  • La ligne de démarcation avait été fermée plusieurs fois parce que les allemands en profitaient, bon on va quitter ce sujet là.

Le père Amand Pichot et le père Jean Delaunay

  • Tu me dis que tu as oublié de me dire que quand mon père me rejetait, oui.
  • Oui, quand ta mère a fait sa fausse couche.
  • Oui.
  • Et qu’on lui a dit que c’était une fille.
  • Oui.
  • Ah, y dit, j’aurais ben sacrifié un gars.
  • (rires).
  • Devant le père Jean Delaunay, au père Jean Delaunay.
  • Oui.
  • J’aurais bien sacrifié un gars pour avoir ma fille.
  • (rires).
  • Mais pas, mais pas mon Jean, alors donc il y avait que toi.
  • Y avait que moi (rires).
  • Je dis, moi qui l’a tant pouponné et qui l’a tant promené, qui l’a tant porté sur mon dos que j’allais à la, aux processions.
  • Oh oui mais ça c’est des paroles de, dites c’est comme ça heu, sans importance (rires).
  • Mais et le père Jean Delaunay il y dit, tu parles mal Amand.
  • (rires) oui, je vois le père Jean Delaunay en train, en train de remettre le père Pichot à place.
  • Oui, il dit Amand tu parles mal, c’est comme un jour il y a donné, il était venu lui aider à charroyer du sable.
  • Oui.
  • De Lécousse.
  • Oui.
  • Et puis le soir, naturellement il a mangé avec nous et, il lui dit, ah ben, je reste à manger mais je ne vais pas être longtemps parce que il dit, faut que je ramène les chevaux, et quand il lui a payé une tasse de café après, ton père a pris la bouteille et y a versé de la goutte. Dis écoute Amand, je me suis servi, j’avais ce qu’il me fallait et ben il dit tu vas le boire ton café et il lui l’a laissé.
  • Le père Jean Delaunay avait du caractère.
  • Il avait du cran, hein, et ben je dis, tiens, c’est un homme, hein.
  • Ah oui oui, ben oui ... bon ben j’arrête.

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dernière mise à jour de cette page le 05/08/2023 à 15:33:06