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Photographe

JJl n'était pas si fréquent de trouver un photographe dans les petites communes. Dans le canton sud de Fougères, en dehors de la ville, il n'y en avait aucun à la fin du XIXème siècle. Le premier à apparaître fut Amédée Fleury à Luitré. Peu d'années après Billé eut le privilège de voir s'installer Joseph Piot.

Élisa Delatouche, mère de Joseph Piot

Joseph Piot naquit à la Messayais en Combourtillé en 1883. Ses parents, Joseph et Élisa Delatouche étaient cultivateurs propriétaires. Son frère cadet, Justin, mourut à deux ans et sa sœur, Alice, restée célibataire, vécut au bourg de Billé jusqu'à l'âge de 90 ans. La famille vint s'installer à Launay-Padou à Billé où décéda le père en 1890. La mère se remaria à Billé avec Joseph Mottais en 1891 et la nouvelle famille continua à vivre à Launay-Padou. Joseph fut recensé à Combourtillé en 1886 mais il n'y a plus de trace de lui à Billé avant 1901. Était-il pensionnaire à Fougères? Au recensement de 1901, il était chez ses parents à Launay et lors de celui de 1906, avec ses oncles et tantes Delatouche, ainsi que sa sœur Alice, dans leur maison du bourg. Comme auparavant, il était alors mentionné comme étant cultivateur.

Dès lors, il est impossible de savoir quel fut son cursus et ce qui motiva le jeune Joseph à devenir photographe. Toujours est-il qu'en juin et juillet 1908, il se trouvait chez A. Mormiche, photographe à Pontorson, comme en témoignent des cartes postales à lui adressées. Il est vraisemblable qu'il y ait appris l'art de la photographie. L'apprentissage fut rapide puisqu'il existe des photos de mariages signées par lui dès 1907. Une photographie de mariage prise dans la cour, devant la forge Sieur en 1907 est troublante. C'est dans cette cour, juste en face de la maison qui abritera plus tard son studio, qu'il photographia de nombreux groupes de noces. Or, celle-ci est signée d'Amédée Fleury. Les deux jeunes photographes ont-ils alors travaillé ensemble?

Mariage
La maison du photographe

En 1910 il épousa Marie-Thérèse Lebret. C'est lui même qui réalisa le cliché du groupe de son propre mariage. Ils habitèrent la maison sise au n°15 de la rue de Fougères. Joseph y installa son studio à l'étage supérieur. Là, il photographiait communiants et mariés et en général les personnes de tous âges qui désiraient un portrait. Des groupes de mariage complets y trouvaient leur place, sans doute les jours où le temps ne permettait pas d'opérer à l'extérieur. Les prises de vues des groupes étaient fréquemment réalisées devant la maison ou dans la cour qui se trouvait de l'autre côté de la rue, mais très souvent il se déplaçait au domicile des mariés.

Vint alors la guerre de 1914. Bien qu'ayant été réformé en 1904 pour bronchite spécifique, il fut incorporé en avril 1915 et versé dans le service auxiliaire parmi les Commis et Ouvriers d'Administration. En mai la même année, il était promu caporal. Il se trouvait alors à Rennes à la caserne du Bon-Pasteur comme en témoigne une carte postale que lui envoya Jean Blanchet, notre musicien bien connu. Il fut détaché à la scierie Masson à Laignelet en octobre 1916. Sa fiche matricule indique encore qu'il passa au 10ème régiment d'artillerie en juillet 1917. Ce régiment avait aussi ses quartiers à Rennes. La guerre se termina pour lui le 22 mars 1919.

Si l'activité s'était arrêtée pendant la guerre, elle reprit intensément ensuite étant donné les nombreux mariages qui eurent lieu à cette époque. Son activité n'était pas, loin de là, limitée à Billé mais s'étendait aussi sur les communes environnantes. Il est avéré qu'il possédait une automobile à bord de laquelle il sillonna tout le canton avec son materiel photographique.

Les mystères de la chambre noire

L'équipement du photographe était bien différent de celui utilisé de nos jours. Pas même de film tel qu'il existait encore à la fin du XXème siècle mais des plaques de verre recouvertes d'une émulsion sensible à la lumière. Préalablement à toute prise de vue, le photographe devait placer une telle plaque dans un boîtier plat appelé châssis. Le châssis pouvait en contenir deux dos à dos; chaque plaque était protégée de la lumière par un volet amovible. L'opération était réalisée en studio dans l'obscurité. Le photographe préparait plusieurs châssis si nécessaire.
L'appareil photo de Joseph Piot se compose essentiellement de trois parties en bois verni: un socle et deux parties verticales. La partie avant, solidaire du socle, porte l'objectif et l'obturateur commandé par un flexible. Elle est reliée à la partie arrière par un soufflet permettant de faire la mise au point. Cette dernière coulisse sur le socle grâce à des glissières. C'est dans cette partie arrière que se forme l'image sur la surface sensible de la plaque de verre. L'étirement du soufflet permet la mise au point de l'image.
Dans un premier temps l'opérateur plaçait à l'arrière de l'appareil un verre dépoli sur laquelle apparaissait l'image. De cette façon il pouvait faire la mise au point en s'abritant sous un tissu noir. Un châssis prenait alors la place du verre dépoli. Ce châssis était équipé d'un système de rideau permettant d'exposer la plaque. Il ne restait plus qu'à manœuvrer l'obturateur pour prendre la photo.

La chambre photographique qui appartenait à Joseph Piot et les accessoires.

Mais ce n'était pas si simple! Lorsqu'il s'agissait d'un groupe, il fallait avoir placé les figurants. Bien rares sont les photographies où ils sont parfaitement alignés. C'était le plus souvent des estrades de fortune: tables, bancs et même charrettes. Au moment de la prise de la photo il fallait rester immobile. La pose pouvait durer plusieurs secondes, due à la faible sensibilié des plaques. Bien des clichés présentent des visages, d'enfants le plus souvent, qui sont flous.

Le photographe regagnait ensuite son studio où il développait les photos. Le négatif des plaques était transféré en positif sur un papier et après traitement et séchage la photo était collée sur un carton portant la signature du photographe. Dans la période la plus ancienne les photos étaient de couleur sépia. Vers les années 1930, elles apparaissent en noir et blanc.

Cartons de Joseph Piot. Du plus ancien au plus récent.

Tout au long de sa carrière, Joseph Piot a photographié des couples de mariés et les groupes de mariages. C'est la partie la plus importante de son œuvre. Viennent ensuite les clichés individuels à tous les âges de la vie, bébés, enfants, communiants, jeunes hommes et jeunes femmes, conscrits, militaires, familles et personnes âgées, voire personnes sur leur lit de mort. Il était là lors d'évènements locaux: fêtes civiles ou religieuses. Sur ce site sont présentés une photo de communion, des reposoirs de Fête-Dieu et même un accident d'automobiles - apparemment peu grave - ayant eu lieu devant le vieux presbytère de Billé.

Il a aussi fait de nombreuses photographies des lieux et des édifices: églises, écoles... Beaucoup de ces clichés furent édités sous forme de cartes postales. Nous en retrouvons quelques-unes dans les pages consacrées au bourg de Billé. Parfois, il alla jusque dans les ateliers et les commerces où les artisans ou les commerçants posaient devant l'objectif: des cercliers, maréchaux-ferrants, charrons, bouchers... Sur ce thème, à voir ci-contre, une vue - très abîmée - de couvreurs œuvrant sur le toit de la maison Cordier, actuellement rue des Jardins.

Malheureusement, sa carrière devait s'arrêter beaucoup trop tôt alors qu'il n'avait que 55 ans. Il décéda le 2 juin 1939 d'une maladie qui l'emporta en trois jours. Le bulletin paroissial de Billé Combourtilé et Saint-Georges-de-Chesné mentionnait son décès dans son numéro de juillet. En outre, il était mentionné que Joseph Piot était membre du Conseil Paroissial auquel il fut élu en 1937 en remplacement de Joseph Mottais son beau-père qui décéda cette année-là.

Après son décès, le studio où il avait travaillé resta plus ou moins en état jusq'au décès de son épouse, Marie-Thérèse Lebret, en 1979. Les milliers de plaques photographiques qu'il avait laissées furent confiées au Musée de Bretagne. Une petite partie seulement de ses clichés est consultable sur le site du Musée de Bretagne. Par ailleurs, de nombreuses photos sont encore dans les tiroirs et les greniers du Pays de Fougères. Ce site en présente quelques-unes, directement en rapport avec Billé, dans les pages consacrées aux Photo de Noces et Photos de Conscrits. L'appareil photo dont il se servait a été soigneusement conservé, ce qui a permis de le décrire en détail dans l'encadré ci-dessus.


Généalogie

Plus d'une centaine de photos de noces réalisées de Joseph Piot sont présentées sur ce site

dernière mise à jour de cette page le 18/08/2023 à 13:24:34